"Aujourd'hui encore, Ines ne regrette pas ses choix. "J'ai le sentiment de mieux servir le Portugal en travaillant pour le ministère du budget que pour le monde de la finance", assure cette jolie rousse, allure impeccable, attablée dans un petit bistrot du Vieux Lisbonne. Pourtant, quand, en 2010, elle quitte son travail de "back office" (le contrôle des opérations financières) dans un fonds d'investissement - "un boulot bien payé, 2 000 euros par mois, sans compter les primes d'été et de Noël" -, c'est d'abord pour avoir une vie plus tranquille et "profiter de [sa] fille". Tant pis si son salaire doit baisser. Son mari, employé dans une ONG, gagne bien sa vie. La voilà donc au ministère des finances : 1 200 euros mensuels sur quatorze mois pour contrôler la bonne exécution du budget.
Aujourd'hui, sa fille a 7 ans, et elle ne la voit pas davantage. Avec la crise des finances publiques portugaises et la mise sous tutelle du pays par les créanciers internationaux, son travail est devenu ultrastratégique. Et il n'est pas rare qu'elle s'éternise à son bureau jusqu'à 2 heures du matin, assistant, actrice et victime à la fois, aux coupes que le gouvernement de centre droit de Pedro Passos Coelho (PSD) fait subir à l'Etat-providence.Dimanche 29 septembre, pour les élections municipales, Ines ira "bien sûr"voter. Pour un parti d'opposition, "sans hésitation". A en croire les sondages, elle ne sera pas seule à vouloir sanctionner le PSD et ses mesures jugées plus "troïkistes que la troïka". Le temps est loin où, comme nombre de ses concitoyens, Ines était d'accord pour contribuer à l'effort national et obéir à la troïka des bailleurs de fonds du Portugal (Fonds monétaire international, Commission et Banque centrale européenne).Il faut dire que ses conditions de vie ne se sont pas franchement arrangées. En janvier 2011, Ines a échappé à la réduction jusqu'à 10 % des salaires des fonctionnaires qui ne frappait que ceux gagnant plus de 1 500 euros par mois. Mais, en novembre de la même année, elle a su qu'elle devrait renoncer pour un an à ses treizième et quatorzième mois. Elle n'est pas près d'être augmentée et ses cotisations pour l'assurance-santé sont passées de 1,5 % à 2,25 % de ses revenus.Cette année encore, la jeune femme aurait dû renoncer à ses treizième et quatorzième mois, si la Cour constitutionnelle n'avait mis le holà en invalidant la mesure. Ines est fatiguée de ces efforts qu'on leur demande sans cesse, à elle et à ses collègues fonctionnaires. "Le gouvernement fait cela avec joie, par idéologie", enrage-t-elle. "Verser nos treizièmes mois n'aurait pas fait dévier le budget. Je suis bien placée pour le savoir !""LE FAR WEST"En dépit du frémissement de la croissance, le chômage reste massif et les déficits excessifs. "Parmi ces citoyens en colère, les "petits soldats de la fonction publique" sont en première ligne. "Hausse d'impôt ou réduction des dépenses, on paie", résume Ines. Beaucoup s'effrayent aussi, qu'à travers les fonctionnaires, on cherche à baisser les salaires de tous et à rogner dans l'Etat-providence. "On est en train de détruire quarante ans de progrès social", s'alarme Catarina Marcelino. Employée dans les services sociaux de la mairie de Lisbonne, cette femme de 42 ans ramène maintenant sa marmite à la mairie "pour économiser le repas du midi", dit-elle.Dans la jeune démocratie portugaise, on reste hanté par la peur de revenir à ces années de misère où le pays était considéré comme un sous-développé de l'Europe. Pour l'éviter, l'espoir, c'est la Cour constitutionnelle. Sollicitée par les partis de gauche, elle retoque, les unes après les autres, les mesures de rigueur présentées par M. Passos Coelho pour réduire le déficit."Heureusement qu'elle est là ! Ça devient le Far West ici", souffle Ines de Medeiros, député et candidate (PS) à la présidence de l'assemblée d'un arrondissement de Lisbonne. Pour l'artiste et femme politique, il ne fait aucun doute que le gouvernement veut faire du Portugal un pays "low cost" et mettre au régime un Etat qui serait "gorduras", plein de "graisse" et gorgé de fonctionnaires paresseux et bien payés.La vérité est plus nuancée... Certes, les dépenses publiques ont beaucoup augmenté avant la crise. Selon l'Organisation de coopération et de développement économiques, elles sont passées, entre 2001 et 2011, de 43,1 % à 49,4 % du produit intérieur brut (PIB). Et placent le Portugal au 13e rang, derrière la France où les dépenses publiques frisent 55,5 % du PIB.Quant aux rémunérations des fonctionnaires, elles sont inférieures à la moyenne pour les professions de secrétariat et relativement plus élevées pour d'autres catégories, comme les officiers de police et assimilés."On a été chassés du paradis, il faut payer pour y entrer à nouveau", pense Joao Duque, professeur à l'ISEG à Lisbonne. "Mais la bonne méthode pour cela, ce n'est pas de faire des coupes aveugles dans les dépenses publiques comme fait le gouvernement", dit-il, plaidant pour réformer l'Etat, et non pour l'amputer."
"Portugal : la crainte du déclassement", par Claire Gatinois (Lisbonne, envoyée spéciale), Journaliste au Monde
HOJE
ResponderEliminarAusente de letras e emoções
regresso
pouco a pouco
que a vida envelhece mas perdura
folheio os espaços que conheço
lentamente
e na primeira esquina que tropeço
reconheço o meu País
num antigo azulejo onde se lê
tão simplesmente
RUA DA AMARGURA
(até eles já sabem...em Paris)
Querida ERA UMA VEZ,
ResponderEliminarNoutros tempos vivi prós lados da rua da Esperança...
Uma esperança que tento, desesperadamente agarrar porque sem esperança, mínima que seja, não há salvação possível.
Bem haja!